Cest intéressant et utile, je trouve, la distinction entre tu et vous - surtout parce qu'on peut exprimer son opinion de l'autre, modifier sa
Cet article a été publié il y a 7 ans 4 mois 24 jours, il est donc possible qu’il ne soit plus à jour. Les informations proposées sont donc peut-être expirées, les commandes ne sont peut-être plus un débat bien français, puisque presque exclusif à la langue française, que je rumine dans ma tête suite à deux évènements l’entrée en vigueur des nouvelles règles pour la Police Nationale et j’insiste sur les majuscules, merci maitre Eolas, et ma récente prise de contact avec un potentiel futur employeur. J’explique. Je tiens à dire que je ne suis ni linguiste, ni expert, je ne suis qu’une personne bizarre qui a appris à aimer la langue française après être sorti de l’école », et qui apprécie un peu plus chaque jour ses subtilités, et déplore à quel point elle souffre avec les nouvelles générations. Tutoyer, vouvoyer. Généralement, on vouvoie une personne adulte qu’on ne connaît pas, ou qui, dans le cadre de l’entreprise par exemple, est bien plus haut perché dans l’organigramme. A mettre sur le compte de la politesse. On tutoie un enfant, un ami, un membre de la famille. Justement, on parle de familiarité. Je vous laisse regarder dans le dictionnaire, vous comprendrez mieux. Bien, mais toutes ces conventions sont transmises par notre éducation, qui se fait avant tout dans le monde physique. Dans le monde numérique cependant, il n’est pas rare de tutoyer le premier inconnu venu sur un forum, un réseau social, les commentaires d’un blog, bref, tout espace d’échange. Souvent, tutoyer quelqu’un qu’on ne connaît pas est pris comme une agression, un manque de respect, du moins dans le monde physique. Mais est-ce pour autant vrai, alors que le numérique, qui nous prend une part de notre temps de plus en plus importante, nous pousse à modifier nos conventions, jusque dans le monde physique ? Avant de répondre plus avant sur le cas français, j’aimerais faire un rapide état des lieux, et des parallèles avec notre belle langue que j’affectionne. Tutoyer n’existe pas en anglais, le you » signifie indifféremment tu » et vous », singulier et pluriel. Ou plutôt devrais-je dire il n’existe plus, car en vieil anglois, le pronom Thou » était souvent utilisé dans ce cadre. Les espagnols et les italiens ont un pronom dédié Usted et Lei respectivement, qu’ils conjuguent à la troisième personne du singulier. Étonnant quand on sait que certaines personnes, par politesse le sujet de départ, s’adresseront à vous à la troisième personne Comment il va ? » vous demandera une personne probablement d’un certain age, pour ne pas dire d’un age certain. Si je ne dis pas de bêtise, les allemands utilisent la troisième personne du pluriel. Pour les autres langues, je vous laisse lire la fiche Wikipedia qui va bien. D’ailleurs, il est courant pour une personne, typiquement anglophone de naissance, de se mettre à vous tutoyer naturellement, car elle apprendra d’abord que you » se traduit tu ». Rien d’irrespectueux, d’impoli, juste une maladresse de traduction. Nos cerveaux sont joueurs. Et ce n’est pas limité aux anglophones, j’ai eu l’occasion de travailler avec des suédois, des thaïlandais, et tous ont du mal à saisir ce vouvoiement les premiers temps. Tout le monde pourra regarder ce qu’il fait, aussi bien dans le numérique que dans le physique, et quand je vais décrire mon cas, j’espère que vous serez surpris. Sur Twitter, je vais probablement tutoyer directement des personnes comme Korben ou Bluetouff, mais je vais vouvoyer Bernard pivot. Je n’ai pourtant pas moins de respect pour les premiers que pour le dernier. Je ne cherche pas non plus une plus grande familiarité pour les uns, ou plus de politesse que les autres. En fait je ne me suis jamais posé la question. Plus étrange, si un jour je viens à les rencontrer physiquement au détour d’une convention par exemple, je les vouvoierais probablement. Sur un forum, rares sont les fois où je vouvoie une personne, sauf si cette personne commence par me vouvoyer. Parce qu’au-delà de garder un même niveau de dialogue, si la personne cherche par le vouvoiement à me montrer du respect, de la politesse, il est tout naturel et presque obligatoire de rendre ce respect, cette politesse. Pourtant, quand je tutoie d’entrée, rien dans mon esprit ni dans mes mots ne cherche à témoigner un manque de respect. Je parlais de contact pour un futur emploi, et la personne, qui est pourtant pratiquement tout en haut de l’échelle de l’entreprise avec laquelle j’ai été mise en contact. Et cette personne m’a adressé la parole directement en me tutoyant, et j’ai répondu en vouvoyant. En suis-je offensé pour autant ? Non, car il y a quelque chose de vital le contexte. C’est très vaste comme concept, car le contexte peut aussi bien désigner la forme du tutoiement, quand il est écrit, le ton quand la discussion est orale, les gestes quand il y en a, l’influence de la hiérarchie pour reprendre mon cadre de l’entreprise. Revenons aux évolutions amenées par le numérique, et en particulier Twitter. Pourquoi ? Le relatif anonymat procuré par les espaces en ligne introduit une forme de familiarité, car tout le monde peut être n’importe qui. Et le nombre de caractères pousse à aller à l’essentiel. Il est donc courant de se tutoyer tout en étant de parfaits inconnus. Faut-il penser que les Twittos sont donc dénués des notions de respect et de politesse ? Non, car comme j’ai dit, le contexte de l’anonymat et de la contrainte des messages limités en taille pousse à ce comportement. Il ne faut donc par défaut jamais se sentir attaqué par un tutoiement. Je ne dis pas que tu vas bien ? » et t’es un gros con » doit être traité de la même manière, là , on touche simplement au contenu, plus au contexte. Pour reprendre le sujet, si le premier contact peut paraître très familier dans le contexte d’un recrutement, les messages par mail, eux, sont plus représentatifs d’un tutoiement qui peut être respectueux. Dans un mail, on a la place de dire bonjour, de dire bon weekend, il est donc plus facile d’être à l’aise quand on vous tutoie. Pour en revenir au monde physique, je vous invite à vous rendre dans un restaurant dit routier, et écouter les conversations. Vous verrez que souvent, tout le monde se tutoie, alors même que personne ne se connaît. Je suis magasinier de formation, et moi-même je me suis pris à tutoyer des camionneurs à peine rencontrés, quand j’ai mis plusieurs mois à tutoyer certains collaborateurs avec qui je discutais pourtant tous les jours. Ai-je pourtant moins de respect pour les uns que les autres ? Ai-je l’intention d’être moins poli ? Non, dans ce contexte, tutoyer permet d’installer une forme de familiarité qui permet de se sentir à l’aise, et rend les échanges plus simples, plus fluides, plus efficaces. Un sentiment qu’on pourrait traduire sur les réseaux sociaux par on est une grande famille d’internautes ». Encore qu’être internaute implique bien plus que de se balader sur Facebook ça c’est surfer sur un seul site web, un internaute, c’est bien plus que ça. Mais je digresse. Doit-on donc se laisser tutoyer à tout bout de champ plus souvent dans le monde physique qu’auparavant ? Non, même si les policiers râlent comme des gamins à qui on confisque un jouet plus sur le matricule il est vrai, nous avons cette distinction de respect, de politesse, et de dignité qu’est le vouvoiement, et je pense que tout le monde devrait au moins s’en souvenir, voir l’apprendre pour les plus demeurés. Non pas qu’il soit déplacé par la suite de tutoyer une personne qu’on connaît à peine, mais là encore il convient d’analyser le contexte avant de prendre sa décision. Vous ne me connaissez pas, si vous me tutoyez tout en restant correct, je n’aurais aucun problème. Mais d’autres le prendront peut-être mal, avec pourtant la même me suis senti agressé par des policiers qui n’ont pas hésité à me tutoyer d’emblée, quand des gendarmes ayant les même besoins se sont adressés à moi en me vouvoyant, me laissant une bien meilleure impression. Vouvoyer permet souvent, du moins dans nos contrées avec l’éducation qu’on reçoit généralement, de ne blesser personne quand bien même c’est involontaire. Ceci dit si l’on vous tutoie, réfléchissez un peu avant de prendre ça pour une attaque. Nous avons tous la chance de disposer de cette nuance qui est utile aussi bien dans le monde physique que dans le monde numérique. Il serait dommage de s’en passer.
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